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Le domaine CIVET

En simplifiant les choses, le site des carrières d'Euville peut être scindé en deux domaines : le domaine Fèvre, situé sur la forêt communale d'Euville, et le domaine Civet, situé dans une zone cultivée des territoires d'Euville et de Vignot. En fait, la Compagnie Civet a aussi été locataire de la commune d'Euville dans la partie Fèvre et, en 1972, une nouvelle société appelée ROCAMAT a regroupé l'ensemble des exploitants.

 

Carrières d'Euville

Au premier plan se trouve La Villette (anciens ateliers de tailleet cité Fèvre ) et juste à gauche, un cavaliers puis les ateliers et carrières Civet. Au-delà de la partie revégétalisée est le domaine Fèvre, avec ses galeries et ses cavaliers, et encore derrière la carrière actuelle.

Le domaine Civet se trouve après les terres cultivées du premier plan. A droite des carrières est la forêt communale d'Euville, à gauche des carrières est la forêt communale de Vignot, au fond entre les deux celle de Jouy sous les Côtes. En arrière-plan on découvre la plaine de la Woëvre, dans la direction de Pont à Mousson.

Carrières d'Euville

D’origine ardennaise, Félix Civet était entrepreneur de travaux publics et à ce titre utilisait la pierre d’Euville dont il connaissait les qualités. Son fils, également prénommé Félix, était salarié aux carrières de pierre Letellier dans les environs de Paris, carrières arrivées à épuisement. En 1853, à seulement 23 ans, Félix Civet fils se lance dans l’exploitation de pierre de taille, il crée la Société « Civet Fils et Cie », devient  marchand-carrier et livre sur chantier à Paris son premier bloc d’Euville le 9 mars 1853.

Les travaux du préfet Haussmann à Paris deviennent un marché sans limites et assurent la croissance de Civet qui ouvre tout aussitôt des carrières à Lérouville.

Sur la partie privée des Carrières d’Euville, au lieudit de La Cantine, des installations techniques et une cité ouvrière voient le jour pour constituer un hameau conséquent. Sur deux côtés de la place étaient les ateliers avec les forges et des logements à l’étage. Le petit côté se terminait par une belle bâtisse carrée avec horloge et clocheton, abritant en bas une école primaire à classe unique et  au-dessus un logement coquet. Cette classe fut transférée en 1896 dans une école neuve, bâtiment d’architecte construit par la municipalité pour répondre à la montée démographique, le seul hameau des Carrières recensant à l’époque près de 600 âmes.

La cité ouvrière confirmait la conception paternaliste de l’entreprise Civet. Sur la rue, neuf logements de deux à quatre pièces se succédaient, tous avec une vaste cuisine avec pierre à eau et âtre, et derrière une grande chambre. Il y avait aussi le bucher, des caves et autres dépendances pour les élevages domestiques. Un passage voûté faisait le lien entre la rue et l’arrière. Il desservait aussi un autre bâtiment à usage d’habitation. Pour accéder à des pièces indépendantes situées à l’étage, les deux plus grands appartements, respectueusement de trois et quatre pièces, avaient un escalier intérieur, les autres étaient desservis par un escalier extérieur à droite de la voûte et un autre contre le dernier logement.

Le hameau était adossé à un cavalier abrupt, résultat de l’entreposage des déchets de découvert et de carrière.

Carrières d'Euville - domaine Civet

La partie gauche était le domaine Civet, avec les forges les écuries, la maison de maître et  les logements des carriers.

Place des Carrières à Euville

Devant la petite construction qui sert de bureau, on a rassemblé une partie des habitants pour les besoins de la photographie.

Place des carrières Euville
cité des Carrières à Euville

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La cité a été vendue puis démontée dans les années 1980. Restaient alors l'extrémité du bâtiment des forges, avec en retour les écuries et le logement attenant. En 1998, un artiste de renommée internationale, né aux Carrières, avait le projet de racheter ces bâtiments pour y créer une école de taille de pierre qui aurait drainé toute l'Europe du nord. Il aurait alors habité sur place et retrouvé son premier atelier de création ainsi que le logement où il a longtemps habité avec sa famille. Malheureusement, pour diverses raisons, le projet n'a pu aboutir et les bâtiments sont aujourd'hui en ruines.

Les installations

Tout contre cette cité et en se dirigeant vers la carrière de la Tranchée, sont une salle d’épures, les ateliers de taille, la scierie, le portique, l'aire d’entreposage des blocs, une maison à usage de bureaux comportant à l’étage un logement confortable. A l’arrière de la bâtisse une grande longueur de balustres en belle pierre montrait le savoir-faire de l’entreprise. En façade était sculpté le logo Civet : une étoile à cinq branches, cerclée et teintée de rouge, rappelant les segments des encrines qui constituent la pierre d'Euville.

Après le démontage du bâtiment qui abritait l'atelier de taille et de tournage, l'ensemble du site a été laissé à l'abandon et au pillage et n'est plus aujourd'hui que ruines reconquises par la végétation des pins noirs, bouleaux et trembles, mais aussi d'un grand nombre d'orchidées sauvages qui font l'admiration des visiteurs.

Anciens ateliers de taille Civet à Euville

L'entrée des ateliers depuis le hameau. A droite dans le cavalier, on remarque le sentier qui mène  à la réserve d'eau alimentant la scierie par gravité.

salle d'épure Civet carrières d'Euville

La salle d'épures, dont on voit ici les ruines, est l'endroit où l'appareilleur dessine sur le badigeon des murs, à l'échelle réelle, les réalisations que devront faire les tailleurs de pierre. ces derniers viennent y copier les gabarits.

Atelier de taille Civet carrières d'Euville
Atelier de taille Civet des carrières d'Euville

L'atelier de taille suit la salle d'épures. Il est déjà très moderne au 19è siècle avec un atelier de tournage important. Des vues de cet atelier en activité (provenant d'archives) ont été utilisées dans le film "Le premier cercle" sorti en 2009.

bureau Civet aux carrières d'Euville

On voit ici l'ensemble ateliers avec le portique et les bureaux.

Le domaine Civet n'a été l'objet d'aucune préservation des bâtiments après leur cessation d'activité. On les trouve donc aujourd'hui en ruines, après qu'ils aient été copieusement pillés. Derrière les bureaux se trouvait une terrasse ceinte de balustrades sculptées dans la plus belle pierre.

Civet-Pommier au carrières d'Euville

La carrière de la Tranchée

Un peu plus loin, on entre dans la carrière de la Tranchée où le ban de pierre présentait une hauteur de 20 à 25 mètres. La carrière Civet est déjà très mécanisée au 19ème siècle, notamment avec des trancheuses et un portique de 50 tonnes qui prend les blocs sur le front de taille pour les descendre au fond de la carrière. Ce portique présente la particularité unique d’avoir un pied dans le fond de la carrière et l’autre en haut du découvert. Au sol il est relayé par une grue sur rails, une locomotive et ses wagonnets, et encore des chevaux.

Les cartes postales anciennes suivantes montrent l'exploitation de cette carrière il y a plus d'un siècle.

Carrière Civet-Pommier à Euville

Vue d'ensemble de la carrière en cours d'exploitation.

carrières Civet-Pommier Euville

Les blocs extraits par les carriers sont taillés par les ébaucheurs pour former des parallélépipèdes réguliers.

enjarrot à la carrière Civet d'Euville

A gauche, le creusement d'un enjarrot.

A droite, vue d'ensemble de la carrière avec le portique de 50 tonnes, la grue sur rails, le petit train pour les déchets, et encore un cheval.

Les terrassiers enlèvent le découvert au-dessus de la bonne pierre. Une locomotive tire les wagonnets sur une voie étroite, ils seront déchargés pour constituer les cavaliers.

Extraction de la pierre d'Euville

Une extraction à l'ancienne.

carrière d'Euville Civet Pommier

La visite de cette ancienne carrière de la Tranchée est très intéressante, on peut y voir les vestiges d'un mur qui pouvait marquer l'entrée de la carrière, la forme convexe de la lentille de pierre, des blocs stockés depuis fort longtemps,des parements taillés à la main ou à la haveuse, un enjarrot, et l'éboulement des parois du découvert.

enjarrot carrière d'Euville

La carrière de la Sablière

Civet exploitait une autre carrière toute proche, dite de La Sablière, située pour moitié sur le territoire de Vignot. S’agissant d’une autre lentille traversée par le chemin de Willery qui séparait les territoires, quand les deux fronts de taille Tranchée et Sablière se sont rapprochés, la jonction entre les deux carrières s’est faite par un tunnel en arc de cercle. Ce tunnel comportait un garage de sécurité pour les utilisateurs, il était doublé d’une galerie où l’on a extrait la pierre. Au-dessus de la Sablière, dans les champs bordant la forêt communale de Vignot, était « le compresseur », véritable usine à fabriquer de l’air comprimé. Un réseau compliqué de tuyaux métalliques amenait l'air comprimé sur tous les fronts de taille, là où travaillaient conjointement 6 ou 7 équipes de carriers.

L’épuisement de ce gisement est intervenu en 1974, entraînant  la disparition de Civet après 120 années de présence active.

Cette carte postale date de l'entredeux guerres. Elle montre toute l'activité de la carrière, depuis le découvert jusqu'au front de taille.

40 ans après son exploitation, la carrière présente un lit de fond uni et se recouvre inexorablement de végétation. On y voit encore un front de taille avec la cascade des niveaux d'extraction, ainsi que deux petites galeries.

Dans deux galeries peu profondes on peut découvrir les procédés d'extraction à la haveuse ainsi que les soutènements des plafonds.

On voit ici des blocs découpés avec un burin pneumatique.

Cette carrière est le paradis des géologues, le découvert est beaucoup constitué de sable jaune, appelé gruine.

Dans les champs au-dessus de la carrière, en limite de forêt, se trouvait "le compresseur" dont voici un vestige. Il s'agissait d'un grand bâtiment comportant quatre toits à double pente, dont les pignons regardaient la carrière. C'est là que l'on fabriquait l'air comprimé nécessaire à l'exploitation.

Juste au-dessus de la Sablière, sur le territoire de Vignot et à l'emplacement d'une très ancienne carrière concernant un ban peu profond, Civet avait construit une grande maison et arboré l'endroit sur plus de un hectare. Il est probable que ce domaine servait de rendez-vous de chasse pour les relations commerciales de Civet.

 

Par la suite, Civet y a logé du personnel : on peut citer la famille Ségaud entre les deux guerres, puis les Chenevat de 1935 à 1940, puis les Martin-Pacilly, puis les Beau. Ces derniers y ont demeuré jusqu'au décès de Raymonde en 1980, Victor rejoignant alors un de ses fils au Luxembourg. Quand le domaine n'a plus été habité, le propriétaire, ROCAMAT, a vendu à un particulier. Après deux changements de propriétaires, la bâtisse a été totalement réaménagée en 2015, elle est maintenant de nouveau habitée.

Le château habité au temps de la famille Chenevat, entre 1935 et 1940 (un grand merci à Monique Chenevat, qui m’a aimablement autorisé à reproduire cette photo de famille). L’entrée était directement au-dessus de la Sablière, à gauche du chemin qui menait au Fort Chabrol.

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